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Vendredi 26 octobre 2007

Vendredi 26 octobre 2007

Nous sommes maintenant vraiment dans la nuit polaire. Plus que jamais le rythme des journées, le fait d’être vraiment occupé est important. Les moments de plaisir et de relax sont donc d’autant plus appréciés.
Le repas, les apéros, le dodo, la lecture, un bon film sur DVD.
Si on se fie à l’avancée de ces derniers jours, on devrait être à Longyearbyen (Iles Spitzberg) vers la fin décembre. Mais le plus tard sera le mieux.
D’expérience quand on finit une aventure, il y a souvent une partie de nostalgie lorsque le port est en vue. Je ne suis pas pressé d’arriver. J’ai tout mon temps jusqu’à fin avril 2008, avec ce congé sans solde.
Et puis lorsqu’on quittera la glace, qu’on ne pourra plus marcher ou skier dessus, ça va beaucoup me manquer, c’est sûr.
Mais on n’en est pas encore là. Alors il faut profiter au maximum de cette aventure.
C’était vraiment magnifique hier soir la lune qui éclairait la glace avec le vent qui charriait la neige. Un pur moment de poésie. Heureusement que je suis venu ici.
Je me suis remis à fond à la photo noir et blanc, je passe des heures dans le froid sans me rendre compte. Comme à l’époque où je me promenais pendant des heures dans les rues de Montmartre à Paris, mon boitier photo à la main. Même sensation de liberté, de paix quand j’écris.
Il faut en tout cas que je profite au maximum du luxe d’avoir le temps. Le must du must, je trouve à notre époque.
Alors que des millions de gens courent partout, avec des contradictions à tous les étages, ici nous avons une vie très saine et simple.
Un mélange de travail physique et intellectuel. Ça me va bien, c’est beaucoup plus équilibré que mon quotidien habituel, où tout tourne surtout autour du travail.
Il faut essayer, réussir à construire autre chose. Plus de liberté, plus de fun, de plaisir dans le travail. On verra sur quoi l’aventure Tara Arctic débouchera. Pour l’instant, CARPE DIEM.
La semaine a été bien remplie avec deux articles écrits pour le journal papier de Tara Expéditions. Michèle Aulagnon, la rédactrice en chef de ce numéro, a apprécié mon papier sur les trois femmes du bord. Tant mieux. J’espère que ce sera pareil pour le portrait de Grant et Hervé.
Cette semaine, il y a eu aussi les envois de reportages vidéo que j’ai tournés et montés pour Paris et les chaînes télévisées françaises. Une fois compressé, les envois de ces reportages durent des heures. Pendant les quarts on relance la liaison satellite des fois dix ou vingt fois. La transmission iridium se coupe très souvent. Normal, on fait passer par un trou de souris le maximum d’images et d’interviews. Une vraie galère. On est tellement nord que c’est le seul moyen. Total : presque trois jours pour transférer un reportage classique d’une minute trente secondes. Et ce n’est que la moitié de ce qui m’était demandé. Bref !
J’ai hâte de voir des aurores boréales. Pour l’instant, la lune amène déjà un peu de magie, mais à mon avis les aurores ce sera un cran au dessus.
En tout cas lorsqu’on photographie la lune, on a l’impression de prendre un cliché de la Terre depuis une autre planète. La planète des glaces. Mais non nigaud, c’est la Terre ! Le toit du monde.
Lorsque le ciel est dégagé, c’est aussi une merveille. La Grande Ourse, les Pléiades, Cassiopée, l’étoile polaire, juste au dessus de nous. Et des étoiles, filantes.
Un ciel comme j’en ai déjà vu dans le désert marocain et sur l’océan atlantique, loin de toutes pollutions lumineuses.
Ici le sable c’est la neige. Les dunes sont en glace. En fait qu’elle soit de sable ou de neige, le dessin des dunes est le même et l’artiste porte le même nom : le vent.
Le Borée sculpte la neige et la glace, comme le Sirocco dans le désert de sable. Ils ne se rencontreront jamais mais pourtant ils travaillent avec le même soin, la même technique, le même savoir. Chacun sur sa latitude.
Sinon à cause de la montée d’eau dans les puits de safrans, on a du redescendre pas mal de drums du pont ainsi que les parachutes. Pour faire remonter la ligne de flottaison et ne prendre aucun risque de voie d’eau.
La sortie des glaces reste une préoccupation majeure, tout comme la résistance des trappes de puits de safrans et la flottabilité de Tara. On a une quille de glace de plusieurs mètres de profondeur immergée en dessous de la coque.
Aujourd’hui, on est à 83°30’ N et on descend franchement cap au sud. Du vent est encore annoncé pour demain. La dérive va donc se poursuivre avec une bonne vitesse, elle est actuellement de l’ordre de 0,2 nœuds ! (Moins d’un kilomètre/heure).
Mais le cap est bon !

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